Feryel Gadhoum [18 août 2004] Chaque année, les ménages français produisent quelque 26 millions de tonnes de déchets et la tendance est toujours à la hausse. D'où des inquiétudes profondes sur le devenir de ces ordures. On sait d'ores et déjà que si rien n'est fait, plus de 75 départements seront submergés par leurs poubelles d'ici à 2010. Du coup, l'incinération semble pour certains l'un des moyens les plus efficaces pour réduire la masse des déchets, puisque l'on ne retrouve à la sortie de l'usine que 10% du volume de ce que l'on y a introduit et 30% du poids. En France, selon les chiffres de l'Agence de la maîtrise de l'énergie et de l'environnement (Ademe), 11,8 millions de tonnes de déchets ménagers sont incinérés chaque année, dont 10,4 millions de tonnes avec récupération d'énergie. Ces derniers fournissent quelque 9,1 millions de MWh d'énergie thermique et électrique, assez pour desservir 3% de la population en électricité et 7% en chauffage. L'équivalent énergétique d'une tonne d'ordures ménagères correspond à environ 150 litres de fioul. Concrètement, selon Novergie, la filiale de Suez spécialisée dans l'incinération des déchets, une fois brûlés, «les déchets produits par 14 familles peuvent alimenter une famille en électricité (hors chauffage)». Les usines d'incinération (UIOM) peuvent en plus accepter une partie des déchets industriels banals non recyclables. Un autre avantage non négligeable des UIOM est la réduction des émissions de gaz à effet de serre, et notamment de CO2. Ainsi par exemple, en 2003, la valorisation énergétique et matière de Novergie a permis d'éviter le rejet de 152 206 tonnes équivalent carbone. Cela grâce à l'économie induite de combustibles nobles, tels que le fioul et le gaz. Malheureusement, le potentiel de croissance de cette technologie est faible en France, selon un porte-parole du ministère de l'Ecologie qui affirme qu'il n'y aura pas d'évolution substantielle du parc des incinérateurs. Pour l'instant, cette technologie coûte plus cher que la simple mise en décharge : 78 euros contre 55 en moyenne. D'autre part, les contraintes sanitaires et géographiques rendent plus difficile toute nouvelle implantation. Les réactions fortement négatives des riverains la rendent parfois impossible. Le phénomène Nymby («not in my backyard», c'est-à-dire «pas dans mon jardin»), venu d'outre-Manche, a en effet fait de nombreux adeptes en France. Il faut dire que les émissions toxiques des anciens incinérateurs, qui auraient, pour certains, provoqué des cancers ou des malformations de foetus dans les régions concernées, incitent à la méfiance. Mais depuis 1998 les rejets de dioxine ont été divisés par cinq et la chute devrait se poursuivre. En attendant, l'incinération n'est pas le seul mode de valorisation énergétique de nos déchets. Depuis quelques années, on récupère le gaz méthane que dégagent les déchets fermentescibles mis en décharges et les boues des stations d'épuration. Ce biogaz peut être utilisé pour produire de la chaleur et de l'électricité. Par exemple, Onyx, la filiale propreté de Veolia, exploite de cette manière le centre de stockage de Bouqueval/Plessis-Gassot à 20 kilomètres de Paris. Ce site traite en moyenne 800 000 tonnes de déchets par an, soit les déchets de 2 millions de personnes. La production totale de biogaz s'élève à 13 000 m3 par heure dont 10 000 sont valorisés pour produire 10 MW/heure d'électricité, soit la consommation moyenne d'une ville de 30 000 habitants. Du coup, grâce à ce procédé, les émissions de méthane, un gaz à effet de serre, ont baissé de 17% entre 1998 et 2000. Reste qu'il ne faut pas se faire d'illusion. Comme l'a rappelé l'inspecteur général des mines Henri Prévot, en 2000 : «La récupération de l'énergie des déchets ne représente pas un enjeu significatif pour l'indépendance énergétique du pays.» _ _ _ _ _ Les cimenteries se chauffent aux pneus E. B. [18 août 2004] Que faire avec les vieux pneus, déchets encombrants s'il en est ? Confectionner des balançoires artisanales ou amortir l'amarrage des bateaux le long des quais ne suffit pas. Parmi les réponses apportées par l'industrie (revêtements de route, trottoirs roulants, murs antibruit...) figure aussi la valorisation énergétique. L'application la plus développée est l'utilisation du pneu comme combustible dans les fours de cimenterie, selon Aliapur, l'association mondiale des fabricants de pneumatiques. En effet, le pneu brûle bien. Son pouvoir calorifique (compris entre 24 et 287 mégaJoules par kilo) est proche de celui du charbon. Une tonne de pneus apporte une énergie équivalente à celle produite par 0,7 tonne de pétrole, rapporte Michelin. Les émissions atmosphériques sont réduites, puisque les matières sont portées à plus de 1 450 degrés. Un bémol tout de même, la directive sur l'incinération prévoit que les cimenteries anciennes ne pourront plus brûler de pneus après 2008. Mais Aliapur a prévu de livrer 40 000 tonnes de pneus usagés par an à cinq cimenteries françaises situées au Maroc. Sachant que cette expédition est contrôlée par les services de l'Etat. Les pneus sont aussi utilisés dans des centrales thermiques, avec production d'électricité, en substitution de tout ou partie du combustible. Ils peuvent être brûlés dans des chaudières industrielles ou dans des unités d'incinération en étant utilisés comme combustible d'appoint mélangé à d'autres déchets. En brûlant les pneus dans les centrales et en roulant dans des voitures électriques peut-être finira-t-on par se passer du pétrole...
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Feryel Gadhoum [18 août 2004] Chaque année, les ménages français produisent quelque 26 millions de tonnes de déchets et la tendance est toujours à la hausse. D'où des inquiétudes profondes sur le devenir de ces ordures. On sait d'ores et déjà que si rien n'est fait, plus de 75 départements seront submergés par leurs poubelles d'ici à 2010. Du coup, l'incinération semble pour certains l'un des moyens les plus efficaces pour réduire la masse des ...
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